Journées d'étude organisées par Gabriele Bucchi (section d'Italien) et Lise Michel (section de Français)
Journées remplacées par la publication d'un volume à paraître dans les "colloques en ligne" du site Fabula.org
Depuis qu'il apparaît sur la scène dans les premières décennies du XVIIe siècle, le sujet du convive (puis festin) de pierre, qui donnera lieu au mythe de Don Juan, construit son dénouement édifiant autour de la mort du protagoniste, considérée comme la punition exemplaire d'un comportement répréhensible par l'intervention d'une instance émanant d'un ordre supérieur (la justice divine, incarnée par le Commandeur). Cette lecture, reconduite dans le théâtre européen des XVIIe et XVIIIe siècles (Tirso de Molina, Cicognini, Dorimond, Villiers, Molière, Thomas Corneille, Rosimond, Goldoni) culmine dans la création du Don Giovanni de Mozart (1787), dans lequel la mort du protagoniste est explicitement suivie, dans l’épilogue, d’un commentaire moral des autres personnages. Cette dernière oeuvre a marqué durablement l’interprétation du mythe et constitue encore de nos jours sa principale forme de survie sur la scène théâtrale, avec le Festin de pierre de Molière.
Depuis les réécritures littéraires de la fin du XIXe siècle jusqu’aux mises en scènes actuelles des œuvres de Molière et de Mozart, la mort de Don Juan a toutefois connu un processus de progressive «laïcisation» qui regarde de façon de plus en plus sceptique (voire nie) la dimension métaphysique du sujet et rationalise le destin du protagoniste. Se pose, dès lors, la question de la nature de la sanction morale qui, sur le plan dramaturgique, fondait le dénouement. Si le comportement de Don Juan n’est plus systématiquement attribuable à une provocation à l’égard du Ciel, selon quel système de valeurs motiver, aujourd’hui, la culpabilité du personnage ? L’inconstance amoureuse peut-elle, à elle seule, fonder la vraisemblance d’une mort aussi exemplaire, impliquant une force supérieure telle que l’incarne le Commandeur ? Comment expliquer la punition, et surtout : qui châtie Don Juan ?
La journée d’étude posera la question de la re-motivation du système moral dans les mises en scène contemporaines du sujet de Don Juan, en se centrant sur le moment révélateur de la mort du personnage, à partir des traitements de ces scènes dans Le Festin de Pierre (Don Juan) de Molière (V, 5-6) et dans Don Giovanni de Mozart (acte II scène 5 et épilogue)