Le Laccus a le plaisir d'entendre Aboubakar Sidi Njutapwoui, boursier de la Confédération. Son discutant sera Didier Péclard, professeur à l'UNIGE
Dès le début de l’insurrection, les leaders de Boko Haram ont clairement manifesté leur ambition de contester l’État postcolonial pour le remplacer par un nouvel ordre dont la légitimité se fonderait sur la religion et la violence. Pour faire face à cette menace, le discours étatique sur la sécurité a longtemps mis l’accent sur la militarisation intensive des localités traumatisées, en perdant de vue la nécessité d’une approche axée sur le contrat social dans la gouvernance de sortie de la violence. À partir du cas de la commune de Mayo-Moskota, mon intervention questionne les représentations sociales associées à l’État dans le contexte de violence exercée par Boko Haram au Cameroun. L’enquête de terrain révèle que l’incapacité de l’État à protéger efficacement les citoyens a conduit à une érosion de sa légitimité et un rétrécissement de sa base sociale. Cette crise de confiance se traduit dans les discours et les attitudes des populations vis-à-vis des institutions étatiques. Dans ce contexte, de nouveaux acteurs, notamment les membres des comités de vigilance, émergent et participent désormais à la gouvernance sécuritaire. La demande insistante d’État dans cette localité pose le défi de re-légitimation de l’État par un nouveau contrat social pour mobiliser collectivement les citoyens dans le processus de stabilisation du Bassin de Lac Tchad.