Dans de nombreuses sociétés, toute transgression morale revêt ou implique un sentiment de culpabilité et une impression de mauvaise conscience, même si sa signification diffère selon les époques et les lieux. Les tragédies grecques présentent les transgressions morales comme des affrontements entre le terrestre et le divin, tandis que le péché originel chrétien condamne l'humanité à une vie de repentance en quête de salut. À l'aube de la Révolution française, des écrivains et des philosophes tels que Choderlos de Laclos ou de Sade ont transgressé les frontières morales pour célébrer le sentiment de liberté qui accompagne également les transgressions morales, tandis que des représentants de l’ordre établi ou escompté ont tenté d'inculquer des habitudes vertueuses, définies par la Bible, la nature ou la promesse d'un malheur. Lors de cette journée d'études, nous nous proposons de réfléchir à la manière dont s'est négociée la relation entre liberté et mauvaise conscience. Comment penser le concept de mauvaise conscience par rapport à celui de la liberté ? La mauvaise conscience est-elle un frein à la liberté de pensée et d’action ou au contraire un instrument divin et moral permettant de distinguer librement le Bien et le Mal ? Pour ce faire, il s'agira en particulier de réfléchir dans une perspective diachronique aux méthodes et aux outils mis en place pour (faire) respecter la morale -- individuelle ou collective, établie ou souhaitée --, comme aux procédés imaginés pour se dégager de la mauvaise conscience issue de la transgression, que ce soit par un appel à la liberté ou par l’obéissance aux injonctions à la docilité. En fin de compte et quoique l’accent soit mis sur les procédés utilisés, cette journée d’étude devrait permettre de repérer des « pics de mauvaise conscience » et d’évaluer jusqu'à quel point ce sentiment hautement inconfortable est une alternative ou une précondition de la liberté. Autrement dit, l’examen des instruments de moralisation déployés devrait permettre de comprendre dans quelle mesure les avancées constatées sur le plan de la liberté personnelle sont non seulement la conséquence d’un désir d’émancipation des règles morales, mais aussi – voire surtout -- le résultat d’une volonté de se débarrasser du sentiment de culpabilité que cette transgression génère.
9:30 -9:45 Accueil et introduction Harro Maas et Irène Herrmann
9.45 -10:30 Eleonora Buono (Université de Lausanne) Un péché que personne n'a jamais commis: Unitarisme et critiques du péché originel dans l'Angleterre victorienne
10.30-11.15 Gabrielle Soudan (Université de Lausanne) : Le libre-arbitre ou le discernement de l’âme au quotidien : L’apprentissage de la réflexivité morale dans les livres pour enfants américains (1868-1930’s)
11:15 -11:30 Pause-café
11.30-12.15 Virgil Wibaut-Le Pallac (Université de Lausanne) : Mauvaise conscience, progrès moral et comptabilité morale : une excursion dans les journaux de jeunesse de François-Marc-Louis Naville (1784-1846)
12:15 - 13:00 Sylvie Moret-Petrini (université de Lausanne) : Gérer sa « mauvaise conscience » au quotidien : les stratégies des jeunes Romands et Romandes au XVIIIe siècle
13.00-14:30 Déjeuner
14.30-15.15 Renata Latala (Université de Genève): S’engager sans mauvaise conscience ? La mobilisation des milieux de gauche dans les années 1970-1980
15.15-16.00 François Courvoisier (Université de Genève): Entre conscience et mauvaise conscience. Expériences d’un historien africaniste d’origine suisse
16.00-16.15 Pause-café
16.15-17.00 Irène Herrmann (Université de Genève): Une mauvaise conscience collective? Un concept au test de la politique extérieure de la Suisse durant la guerre froide.
17.00 Conclusions