Julia Cela, assistante en section de français à l'UNIL et chanteur, viendra donner une conférence dans le cadre du cours « Chanson française », EFLE (Yves Erard)
Résumé
Le flow, qui désigne le « rythme verbal »[1] d’un·e rappeur·euse, est un instrument descriptif difficile à manipuler. Cyril Vettorato propose d’en faire l’équivalent pour ce genre musical du style en littérature [2]. Au même titre que le style, le flow peut être envisagé comme la part expressive de l’identité musicale d’un·e artiste, mais également comme un élément qui connaît des tendances, des modes et des évolutions lorsqu’il est saisi dans une perspective diachronique : le flow des artistes boom-bap des années 1990, n’est pas celui des artistes trap des années 2010.
Le flow comme objet d’analyse se trouve par ailleurs à l’intersection de disciplines diverses. Il désigne avant tout un phénomène musical, mais qui tient de l’articulation de la musique, de la voix et du texte à prononcer. Mais c’est également un élément important de la posture des rappeur·euse·s en tant qu’il manifeste l’ « hexis corporelle » – c’est-à-dire l’attitude corporelle – de celui-ci, et participe donc de l’élaboration de sa persona publique. Dans cette perspective, le flow peut alors être considéré comme un « opérateur de l’action et de manières d’êtres »[3] propre au rap.
En nous mettant à l’écoute des artistes[4], on constate également que le flow est un élément de socialisation majeur des acteur·ice·s de cet espace artistique. « Trouver son flow » c’est dévoiler le coeur de sa propre identité musicale. Cette conférence entend donc s’intéresser au flow comme un rite de passage et une pratique collective propres au monde social du rap.
[1] Vettorato Cyril, « Le rap ou la démesure de la mesure », in Cahiers de littérature orale, n°73-74, 2013, p.2.
[2] Ibid. p. 3
[3] Sapiro Gisèle (dir.), Dictionnaire international Bourdieu, « Hexis », Paris : CNRS Éditions, 2020, p. 405.
[4] Cette intervention sera appuyée d’extraits vidéo d’interview d’artistes français et suisse romands.